BILLETS D’HUMEUR N°2 :  » Les moustiques »

CHUI CHAUD, CHUI CHAUD par Mélanie

Chui chaud chui chaud chui chaud ! Ça fait deux heures que chui sur le qui-vive, dans les starting blocks. Suffira d’un seul signe et je sauterai à l’assaut avec les amis. Cette bande de zinzins, je les suivrais partout. Avec ceux-ci, je suerais sang et eau, quelle que soit la campagne, surtout s’ils me susurrent des raisons irrésistibles. Là, ils se sont tous mis à scander « Moustiques, sus au nourrisson ! ça va saigner !”. Ça m’a donné soif, alors je les ai suivis sans hésiter. On est comme ça, nous, on la joue collectif. Un pour tous et suce pour un !

BZ, BZ, A L’ATTAQUE ! par Nicole

Une fenêtre ouverte, deux humains avachis. Vite, les filles et les gars, mettez-vous en ordre de bataille. On fonce !
Bon, ça va, tout le monde suit. Maintenant, c’est chacun pour soi. Moi, je me réserve cette tendre épaule nue. C’est là que le sang est le plus facile à atteindre et le plus goûteux. L’approche, c’est le plus important. Décrire des grands cercles, discrètement, en battant des ailes délicatement, pour atténuer le bzz, bzz qui les rend nerveux, hystériques même pour certains.
Très égoïstes, ces humains. Ça leur coûte quoi, une microgoutte de sang ? Pour nous, au contraire, c’est vital, notre survie dépend de cette seule nourriture.
Ça y est, c’est réussi ! Humm ! Miam ! Succulent et de toute première fraîcheur, un véritable nectar. Hahaha ! Elle a essayé de m’écraser et a hurlé comme une folle. Hystériques, je vous dis, tous ces bipèdes lourdauds et d’une intolérance effrayante. Difficile de les prendre au sérieux quand ils sont effrayés par une micropiqûre, exaspérés par notre vol si élégant, incapables d’admirer notre taille si mince, nos pattes si fines et agiles, les rayures si classe de nos cousins tigres. Des petites merveilles, voilà ce que nous sommes et tant de haine envers des créatures aussi parfaites, c’est révoltant !

« ÇA VA SAIGNER » par Arnaud

Un nuage de moustiques s’approche dangereusement de la fenêtre. Godefroy Malefoin, médecin, est dans tous ses états. Car enfin, les moustiques attaquent. Il se sent devenir dingue à l’idée d’attraper la dengue. À moins que ce ne soit le Chicot du Bougnat, maladie horrible qui mène à la folie. Tel un sorcier, il brandit une bombe antimoustique, espérant ainsi anéantir l’assaut dirigé par Anathème, femelle moustique en âge de procréer, avide de son sang pour concevoir sa descendance.
Sa famille dans son dos, une femme effrayée à l’idée de servir de repas à cette bande de moustiques assoiffés de sang et deux bambins qui se demandent bien ce qu’ils font cachés derrière grand-père. Il n’a plus toute sa tête, cela fait bien longtemps qu’il joue les sorciers, pour la plus grande inquiétude familiale. D’aucuns disent qu’il a perdu la boule.
C’est à ce moment que le vieil homme s’enhardit en criant comme au temps des Capétiens « Montjoie ! Saint-Denis ! ». Le combat de cet homme s’annonce opiniâtre. Un nuage toxique envahit la pièce alors que l’armada de moustiques se précipite sur ses proies.

LES MOUSTIQUES – (Chaleur/Lumière/bZZZ) par Julie

D’abord la patte gauche, puis la patte droite.
On pourrait croire à une publicité où un célèbre joueur se prépare à entrer dans le stade. C’est exactement ça finalement. C’est ce qu’il allait se passer. Dès lors que la lumière jaillira, ce sera l’assaut. Mon tout premier.
J’ai vu les plus anciens faire cela des dizaines de fois ; cela tombe toujours aux mêmes moments, une forte chaleur, une atmosphère lourde, pesante, moite. On ne peut pas se tromper, une fois que toutes ces conditions sont réunies, on le sent, on le ressent. On se prépare pour le grand frisson ; nos estomacs grands ouverts, nos ailes agiles en alerte, nos corps hâtifs et prêts.
Les couleurs du crépuscule approchent… Ce n’est qu’une question de temps, toutes et tous s’excitent, s’affolent.
Nous les guettons comme des lionnes dans les hautes herbes. Mais attention, à tout moment, ils peuvent nous tuer. Cette attaque sera ma première, et peut-être la dernière. J’en tremble, j’ai tellement peur. Je vérifie que tout fonctionne, plus que quelques secondes mais un bruit m’arrive aux oreilles… que m’arrive-t-il ?
D’où cela vient-il ? Ma trompe grossit et couine, elle se met à ronfler sans que je ne demande rien ! Qu’est-ce donc que cette diablerie ?
Mamann !!
Mamm… Bzzz, Bzzz, Bzzz
– Ça y est tu es prêt mon chéri !
À l’attaque !

LE SOUFFLE D’UNE MAIN D’ETE par Mélanie

Et dire que, il y a quelques jours encore, je me prélassais dans l’étang, derrière la maison ! Dehors, il faisait bon ; chaud, même. L’eau, elle aussi, se maintenait à une température idéale. Je pouvais barboter des heures durant, sans le souci d’en sortir saisie ou d’y rester, glacée. Le bain s’avérait si plaisant que tout le voisinage s’y amusait. Les cousins me disaient même y avoir avisé des dizaines de têtards, dans une zone suffisamment distante. Ils ne s’y sont pas éternisés et, en ce qui me concerne, j’ai pris soin de ne pas me risquer de ce côté-ci : je n’apprécie pas spécialement ces animaux-là. Grenouilles ou crapauds, ils sont tous aussi angoissants : je ne supporte pas leur visqueuse salive. Je n’étais d’ailleurs pas sereine face à l’hypothèse que ces esquisses de batraciens deviennent des adultes susceptibles de s’approcher aux environs encore paisibles. J’aurais supporté des sangsues plus sûrement que ces sacs à mucus. Et puis le soleil a intensifié ses Celsius, faisant même suer l’atmosphère. Je me suis senti pousser des ailes : zen, surfant sur ces chaudes émanations, j’ai survolé la surface de jour, comme de nuit. Car, si la lune n’apaisait plus le brasero solaire, elle diffusait ses ondes lumineuses sur tous mes agissements. Alors je me suis mise à zigzaguer tous azimuts, suivant juste mon instinct, sans raison précise. Enfin, satisfaite, mais assoiffée, j’ai traversé le bassin, décidée à me rassasier. Ainsi, je me suis hasardée vers la maison, qui exhalait une douce senteur citronnée. Sitôt entrée, je me suis associée à la zizanie sifflotante de mes amies arrivées avant moi. Sans hésitation, j’ai foncé sur ma cible, je me suis posée et j’ai siphonné son sang. Si seulement j’avais senti le souffle annonciateur de sa main qui m’a écrasée !

Crédit photo : https://unsplash.com/fr/@wilsanphotography?utm_content=creditCopyText&utm_medium=referral&utm_source=unsplash

Commentaires

  1. Lapeyre says:

    Très inspirantes vos histoires d’été.
    Elles m’ont toutes enchantée.
    Bravo

    1. Fanny says:

      Merci Marie-France pour ce commentaire que je transmettrai aux participants. Au plaisir de te retrouver en atelier distanciel ou présentiel. Fanny

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